Une famille dévastée par une étrange série de suicides
12/07/2022
Une plainte pour provocation au suicide vient d’être déposée contre un homme dont l’ex-femme et le fils de 15 ans ont mis fin à leurs jours à six mois d’intervalle, après qu’un membre de la famille a fait appel à un avocat lillois.
ARTICLE PARU DANS LA VOIX DU NORD, le 16/10/2018, par Em. C.
Mathéo (*) s’est suicidé le dernier dimanche d’août. Il aurait eu 16 ans il y a quelques jours. « Il s’est pendu au domicile de son père », souffle son oncle, encore submergé par l’émotion. L’adolescent s’est donné la mort dans une commune à la limite de Lille. À l’intérieur d’une maison où il a longtemps fait face à la dureté de son père. Au début de l’année, c’est la mère du jeune homme qui se suicidait. « Elle s’est pendue le 15 février 2018. » À son domicile dans le bassin minier. Une mère et son fils qui se suicident à six mois d’intervalle : l’oncle est persuadé que ce n’est pas le fruit du hasard. « Ma sœur s’est séparée de son mari en 2007, mais il a continué à la harceler. Mon neveu a dû rester vivre chez son père. »
« La société de transport n’a pas vérifié son casier ».
Comment en arrive-t-on à de telles extrémités au sein d’une famille ? L’oncle parle de violences morales. De coups parfois. « Le 10 août, nous avons fait une main courante. Son père a frappé mon neveu. » La culpabilité est là. Elle suinte par tous les pores de sa peau. « On ne s’est rendu compte de rien. Tout ça se passait dans l’intimité de la maison. » Ce vendredi 10 août, Mathéo a quand même eu le temps d’appeler son oncle au secours. « Je me suis interposé. Il est beaucoup plus grand, plus fort que moi, mais il ne m’a pas fait peur. » L’oncle et le neveu finiront ce soir-là au CHR. « Il (le père, l’ex-mari) est connu des services de police. Quand il habitait dans la région lyonnaise, il a renversé deux fillettes. Il a commis un délit de fuite. Il a demandé à ma sœur de dire que c’était elle qui conduisait, parce qu’il bossait dans le transport. Elle a tenu bon. Il a été condamné à une peine de prison. Mais on lui a retiré son permis. On ne lui a pas annulé. Quand il est arrivé dans la région, la société de transports qui l’a embauché n’a pas vérifié son casier », a pu vérifier l’oncle.
Une plainte déposée pour provocation au suicide.
Dans le sillage de cet homme-là, on compte au moins deux autres suicides. « Il a rencontré quelqu’un sur son lieu de travail qui s’est, elle aussi, suicidée. Et puis, il y a sa mère, qui s’est pendue quand il était adolescent. » « Je suis persuadé que si mon neveu et ma sœur se sont pendus, c’est pour que lui aussi soit rongé par la culpabilité. »
Cette dramatique histoire de famille est maintenant entre les mains de la justice. La famille de Mathéo et de sa maman a, par le truchement de Me Blandine Lejeune, déposé une plainte pour provocation au suicide et pour harcèlement. « J’ai écrit au procureur de la République le 4 septembre, détaille l’avocate. Soit on nous dit qu’une enquête préliminaire est en cours, soit on classe et auquel cas nous nous constituerons partie civile. »
(*) Le prénom a été modifié.